Offensive de la Région Normandie sur les labels HVE : attention !
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Communiqué de presse

Rouen, le 23 avril 2021

Offensive de la Région Normandie sur les labels HVE : attention !

L’approbation, lors de la Commission permanente de ce lundi 19 avril – à deux mois de la fin du mandat, d’un appel à manifestation d’intérêt pour la structuration de filières Haute Valeur Environnementale (HVE) en Normandie, ouvre la porte à une certification massive des exploitations de notre région, jusqu’ici peu concernée par la HVE.
Ce label HVE est un leurre puisqu’il permet aux exploitants d’obtenir cette certification – et les avantages liés – tout en continuant d’utiliser les mêmes pesticides ; il n’est en aucun cas l’outil de transition agro-écologique qu’est par exemple le label bio.
Le groupe Normandie Ecologie-EELV fait part de sa vive inquiétude face au développement de cette certification dans notre région et le coup de frein qu’il pourrait représenter pour la transition agricole.

Mis en place en 2008, suite au Grenelle de l’environnement, le label Haute Valeur Environnementale visait à accompagner les exploitations dans leur transition vers l’agriculture bio. Aujourd’hui détournée de son objectif initial, la certification HVE est présentée comme une fin en soi, permettant la labellisation des produits et peut-être demain l’obtention d’aides de la PAC. Les exploitations peuvent déjà bénéficier d’un crédit d’impôt HVE de 2500 euros inscrit dans le Projet de loi de finances 2021, pour un montant total de 76 millions d’euros.

Dans son appel à manifestation d’intérêt (AMI), la Région fait état d’un « retard » du développement de la HVE en Normandie, avec moins de dix exploitations certifiées. L’ambition de cet AMI est ainsi de mobiliser « un grand nombre d’agriculteurs » et de certifier des filières entières en HVE. Cette certification, que l’on atteint via le label HVE de niveau 3, comporte deux options, A et B, comme l’explique la Confédération paysanne :
« L’option A est basée sur le respect d’un cahier des charges faible et incohérent – avec la certification HVE, il est par exemple possible d’utiliser des pesticides cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR). L’option B est ridicule puisque basée sur le ratio du coût des intrants par rapport au chiffre d’affaires. Ceux qui ont les plus gros chiffres d’affaires peuvent utiliser plus d’intrants (ex : pesticides) et ne rien changer à leurs pratiques. Pas étonnant que les exploitations HVE soient majoritairement viticoles (1400 sur les 2200 certifiées). »

Alors que le label Agriculture Biologique (AB) est basé sur des critères contraignants, par exploitation et par produit, constituant ainsi un instrument central de la transition agro-écologique, la valorisation d’un label désormais concurrent auprès des consommateurs (et peut-être à l’avenir afin de percevoir des aides de la PAC) sans contrepartie environnementale, est préoccupante.
Ce label HVE est en l’état actuel des choses un outil de greenwashing : la démarche de transition agricole mise en avant par certains acteurs politiques et de l’agriculture est illusoire, puisqu’elle n’oblige en aucun cas à renoncer aux pesticides. Cela ne correspond ni aux impératifs environnementaux, ni aux attentes des citoyens. Alors que la Normandie est riche de ses AOP, AOC et Labels Rouges, la HVE créera à nouveau de la confusion, de la frustration entre producteurs et consommateurs. Elle nous détournera par ailleurs de l’objectif stratégique de souveraineté alimentaire qui doit reposer sur le repeuplement de nos campagnes par les paysans.

La Région a le devoir de s’engager pleinement dans la transition agro-écologique en soutenant massivement les exploitations passant à l’agriculture biologique. Avec cet appel à manifestation d’intérêt, elle choisit à la place de participer à l’enracinement du label HVE en Normandie, source d’immobilisme et réelle menace pour le développement du bio.

Laetitia SANCHEZ
Présidente du groupe Normandie Ecologie – EELV
Conseillère régionale de Normandie

François DUFOUR
Conseiller régional de Normandie
Ancien vice-président de Basse-Normandie chargé de l’agriculture
Ancien porte-parole de la Confédération paysanne