Communiqué de presse – Présentation du dernier budget de M. Morin, Président de la région Normandie : pour les 5 ans de la COP21, quel bilan pour le climat ?
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Communiqué de presse

Vendredi 11 décembre 2020

Présentation du dernier budget de M. Morin, Président de la région Normandie : pour les 5 ans de la COP21, quel bilan pour le climat ?

La lutte contre le changement climatique requiert des actes et des résultats concrets.

Les coups de communication comme la remise du prix Normandie pour la Paix à la jeune Greta Thunberg en juin 2019, ou le lancement d’un GIEC normand en décembre de la même année, ne peuvent remplacer l’action.

À ce titre, nous serons attentifs aux conclusions des travaux de ce groupe de travail, qui seront présentés aux élus régionaux lundi 14 décembre.

Au niveau régional comme au niveau national, nous sommes en droit d’attendre des pouvoirs publics qu’ils justifient leur action climatique afin de tenir les engagements de réduction des gaz à effet de serre de la France à l’horizon 2030. C’est le sens de l’injonction du Conseil d’Etat envers le gouvernement, qui dispose de 3 mois pour répondre à la saisine de la commune de Grande-Synthe.

Par la loi NOTRe de 2015, la Région a été désignée chef de file pour le Climat : la Région est en effet l’échelon territorial pertinent pour coordonner et impulser des politiques transversales, visant à réduire concrètement nos émissions de gaz à effet de serre.

Dans ce contexte, les crises doivent nous alerter : méconnaître les signaux faibles, retarder l’action, c’est s’exposer à des conséquences d’une gravité démultipliée par cette inaction.

Or, que lisons-nous dans ce dernier budget du mandat de M. Morin ?

Aucune remise en question du modèle à l’origine des crises que nous traversons. Le modèle de relance économique proposé par la Région reste basé sur la recherche de nouveaux marchés internationaux, plaçant la Normandie au cœur d’une économie mondialisée basée sur l’import-export, qui augmente le solde de nos émissions de gaz à effet de serre. Les secteurs d’excellence soutenus par la Région confortent ce modèle : développement de la logistique, soutien au transport routier via l’investissement sur les routes et les autoroutes.

Le chantier d’autoroute de l’A133-A134, que M. Morin est de plus en plus seul à porter avec sa majorité, en est l’un des symboles. Au total, ce seront plus de 300 millions d’euros de crédits d’investissement qui auront été alloués sur le mandat à l’extension du réseau routier et autoroutier, en dépit des centaines d’hectares détruits, des pollutions de l’air, de l’eau, des sols, et des tonnes de CO2 en plus. Rien ne semble trop précieux pour stimuler la croissance.

Nous sommes loin des relocalisations et des circuits courts auxquels aspirent de plus en plus nos concitoyens en quête de sens et d’impact positif de leur consommation, surtout après l’année que nous avons connue.

Avec sa responsabilité de cheffe de file pour le climat et d’autorité organisatrice des mobilités, la région se devrait au contraire de peser pour le report vers les transports collectifs et le fret non routier pour les marchandises. À l’instar des travaux sur la ligne du sucre entre Pont de l’Arche et Etrépagny, on pourrait relancer la ligne du blé entre Rouen et Orléans ou la ligne Ferrero entre Villers-Ecalles et la métropole. Mais la politique régionale d’Hervé Morin préfère soutenir la logistique routière, avec la multiplication des parcs d’activité à proximité des échangeurs, à Criquebeuf, Heudebouville ou la Haie Tondue.

À l’inverse, le service ferroviaire n’a cessé de se dégrader, avec l’augmentation des tarifs, la suppression de nombreux arrêts, le renoncement au cadencement et à l’amplitude qui permettraient d’en faire un réel moyen de transport du quotidien. De nombreuses « petites lignes » du quotidien restent délaissées (Caen – Flers, Caen – Blainville – Ouistreham, Evreux –  Honfleur via Glos Montfort,  Yvetôt – Saint Valéry en Caux, Pont de l’Arche – Gisors, Le Tréport – Abancourt, Abancourt – Rouen via Serqueux – Buchy – St Martin du Vivier…) Et l’étude sur la liaison des préfectures voisines de Rouen et d’Evreux aboutira… à la mise en place d’un nouveau car (électrique ou hydrogène, that is the question).

Dans cette période où le transport aérien est questionné par les crises sanitaire et climatique, la Région investit année après année des millions dans l’agrandissement d’aéroports déficitaires et géographiquement très proches. Cette année encore, 6M€ sont investis par la Région pour agrandir les aéroports de Deauville et Caen… à 50 kms l’un de l’autre.

Nous constatons qu’en cette dernière année de mandat, la Région se décide enfin à soutenir l’investissement dans les pistes cyclables : c’est tendance, et il n’y a pas de matériel à entretenir. Avec le succès des coronapistes en sortie du premier confinement, l’Etat mettra ainsi 10M€ pour le vélo dans le nouveau projet de Contrat de Plan Etat-Région avec la Normandie, reconnaissant enfin le rôle du vélo comme moyen de déplacement. La Normandie a tout pour devenir une région exemplaire en matière de mobilités cyclables, si tant est qu’une volonté politique se traduise en actes.

« Région de toutes les énergies », la Normandie reste en première place du classement des régions pour les émissions de CO2 par habitant.

En terme de rénovation thermique des logements, nous avons rappelé lors de la dernière présentation du plan Bâtiment Durable en octobre dernier que sur les 1 747 747 logements normands, 12 000 ont été rénovés en 4 ans, bien loin de l’objectif de 30 à 40 000 par an inscrit dans le SRADDET.

Nous savons que le volet financier reste un frein à la mise en travaux et nous plaidons depuis le début du mandat pour la mise en place d’une structure régionale de tiers financement, qui se rembourse avec les économies réalisées sur les factures énergétiques. Ca marche, à condition d’être porté politiquement !

Enfin, l’agriculture, responsable de 19,4% des émissions de la France en 2019, a également un rôle à jouer pour le climat, et non des moindres. Avec 2 millions d’ha agricoles, la Normandie reste la 1ère région de France dans ce secteur. Mais l’augmentation de l’artificialisation des sols (+38% entre 1990 et 2018), la perte de plus de la moitié de ses prairies au cours des 3 dernières décennies, menacent la fonction essentielle de puits de carbone.

Le modèle d’import-export touche aussi ce secteur, avec l’importation de viande ou de soja, responsable d’une déforestation importée. Alors certes nous pouvons soutenir le plan Protéines végétales développé au cours du mandat pour l’alimentation humaine et animale, à condition que ce ne soit pas du « en même temps » !

À la jonction des politiques européennes, nationales et locales, la Région a la responsabilité de mettre ses politiques régionales en conformité avec une règle d’or climatique.

En matière d’économie, d’agriculture, de transports, d’aménagement du territoire, d’habitat, de déchets, d’enseignement, la Région doit conditionner ses investissements et ses aides à des bénéfices en matière environnementale et sociale.

C’est la règle d’or budgétaire que le groupe Normandie Ecologie propose à la Région année après année, et dont la nécessité se trouve encore renforcée par les crises sociales et sanitaires qui fragilisent notre modèle.

L’ère du « en même temps » n’est plus possible : ajouter quelques touches vertes à une somme d’activités polluantes, ce n’est pas seulement ne rien faire, c’est foncer vers le précipice en se bouchant les yeux.

À l’heure où les conclusions du GIEC normand doivent mettre les politiques devant leurs responsabilités, il est grand temps de mettre fin au temps des promesses reniées.

Laetitia SANCHEZ
Présidente du groupe Normandie Écologie – EELV
Conseillère régionale de Normandie