Assemblée plénière – Lundi 14 décembre – Intervention de Caroline Amiel relative à la création de la SASU Normandie Prêts Participatifs
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Madame la Vice-Présidente, mes chers collègues,

Nous sommes comme vous tous, ici présents, très préoccupés par les conséquences de la crise sanitaire sur le tissu économique normand, c’est pas le problème. Mais comme vous venez de le dire Madame Gaugain, plusieurs aides spécifiques ont été mises en place depuis mars dernier, qui ont été présentées dans le plan de relance et voici que l’on nous soumet un enième dispositif portant sur des prêts participatifs. Des prêts aux entreprises à taux faibles, certes, remboursables sur 7 à 10 ans comme cela nous a été expliqué en commission.

Nous nous interrogeons cependant sur la pertinence d’un tel dispositif, d’autant qu’il persiste aussi un certain flou sur son fonctionnement, son articulation avec les autres dispositifs régionaux et la constitution de son conseil d’administration, malgré les 25 pages de statuts qui pour nous ne sont malheureusement pas un gage de l’intérêt de la structure, même si les statuts sont verrouillés, on voit qu’ils sont pas toujours très bien suivis.

Vous comprendrez bien que deux mois après la polémique soulevée par le rapport de la Cour régionale des comptes sur le fonctionnement de l’Agence de développement pour la Normandie qui a pointé du doigt des cas limites de conflits d’intérêt, du gaspillage d’argent public, des charges de fonctionnement supérieures aux aides économiques dispensées aux entreprises normandes, nous nous abstenions a minima, voire nous votions contre cette proposition de nouvelle structure.

Non pas que nous refusions de venir en aide aux entreprises de la région mais bien parce que nous considérons que l’outil proposé, qui génèrerait des intérêts pour la Région via des prêts aux entreprises, ne nous semble pas adapté à une situation d’urgence.La Région pour nous n’a pas à jouer le rôle d’un établissement bancaire, il y a là confusion des rôles et il y aurait encore complexification pour les entreprises entre les trop nombreux dispositifs régionaux, qu’ils soient portés par la Région elle-même, par l’ADN ou par Normandie participation.

Le rapport de la Cour des comptes a eu le mérite de répondre aux nombreuses questions que nous vous posons depuis quatre ans sur le bilan des différents dispositifs et leurs relations les uns avec les autres.C’est quand même un comble d’y lire qu’au final, l’ADN n’aide que 0,4% des entreprises normandes, que les emplois créés qui nous sont présentés en plénière ou en commission au travers de bilans un peu saupoudrés dispositifs par dispositifs ne sont finalement pas si réels puisqu’ils prennent en compte des entreprises aidées conjointement par la BPI et la CCI, que vos effets de manches « sur l’attaque en horde des entreprises normandes à l’export » sont d’une toute autre réalité et que les emplois créés ou maintenus dans ce secteur que vous estimiez à 2179 pour l’année 2017, recalculés par la Cour des comptes tombent à 896, ce qui place la Normandie parmi les trois régions les moins performantes au niveau national !

Vous le savez, nous ne nous en sommes pas cachés, nous étions méfiants dès le début du mandat, nous avons perdu à ce stade toute confiance dans les outils proposés par votre majorité. Il est temps de changer de vision et de gouvernance en matière économique, nous ne cessons de vous le dire, d’autres voix sans doute plus objectives que la nôtre, nous donnent raison aujourd’hui : quand la Cour des comptes vous épingle sur la multiplicité et la porosité des dispositifs d’aide aux entreprises dans la Région, votre réponse est d’en proposer un nouveau ? Je ne sais pas comment qualifier cette attitude ? Inconscience, incompétence, ou juste croyance aveugle dans un modèle libéral de capitaliste moribond ?

En tout cas notre groupe ne se rendra pas complice de cette perte d’énergie et d’argent public. Nous le regrettons mais nous pensons qu’il y a d’autres moyens d’aider les entreprises qui sont déjà mis en place.
Je vous remercie, je regrette, beaucoup.