Tribune – Gilets jaunes, climat, mobilité : apportez-nous des solutions pour les déplacements du quotidien, pas de nouvelles autoroutes à péage !
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Tribune 

Rouen, le 28 novembre 2018

 

Gilets jaunes, climat, mobilité : apportez-nous des solutions pour les déplacements du quotidien, pas de nouvelles autoroutes à péage !

 

Le gouvernement annonce une réponse aux gilets jaunes dans la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie, pour économiser l’énergie et changer les modes de chauffage les plus polluants.

Si les gilets jaunes protestent contre toutes les augmentations qui touchent leur budget, c’est le sujet du carburant qui a mis le feu aux poudres.

Le gilet jaune que chaque propriétaire d’automobile doit obligatoirement avoir dans son véhicule est devenu l’étendard de cette protestation des automobilistes, qui s’est étendue au blocage des autoroutes et des centres commerciaux.

Les points de blocage choisis sont emblématiques du modèle de la France automobile que les aménageurs ont imposé comme mode de vie depuis les années 1970 – entraînant un étalement urbain sans transports publics, où chacun a dû se débrouiller et s’endetter pour se loger, puis se déplacer.

Une, deux, voire trois voitures seraient nécessaires pour pouvoir se déplacer dans cette France des classes moyennes, celles qui ont quitté les villes pour devenir propriétaires.

On a entendu que c’était la révolte de la France qui travaille, et à qui on n’a pas apporté de solutions de mobilité autre que de la route, ou des autoroutes hors de prix. D’où les gilets jaunes sur les radars, la protestation contre le 80km/h, et les barrages filtrants aux péages.

C’est l’explosion de colère contre un modèle qui n’est plus viable.

Parce que le carburant pollue et dérègle le climat : il faut réinventer nos façons de nous déplacer, de travailler, de consommer. Raccourcir les circuits, rapprocher les lieux, apporter des transports là où les gens habitent, et arrêter l’étalement urbain.

C’est le contraire exact des projets de loisirs et de consommation qui continuent à détruire les terres agricoles et les centres-villes, pour un modèle du gaspillage et du tout-voiture – loin du besoin de sens et de résilience de notre époque. Les projets de Parc Viking près d’Évreux ou de Village de Marques près de Vernon en sont la triste illustration dans l’Eure.

Le calendrier est propice, avec la présentation cette semaine de la loi d’orientation des mobilités (LOM) par la ministre des Transports Élisabeth Borne.

C’est le moment d’engager toutes les solutions de mobilité bonnes pour le climat et pour nous tous : le soutien au transport ferroviaire, aux transports collectifs, aux mobilités actives sécurisées, et la taxation du kérosène sur les vols internes.

Nous ne taxons pas : au contraire, nous subventionnons le transport aérien pour cinq aéroports normands concurrents, qui ne profitent qu’à moins de 1% de la population, et 4% des voyages longues distances. Les plus riches et les plus polluants ne sont pas taxés, mais subventionnés. Et 95% de ces voyages sont concentrés dans deux aéroports seulement, Caen et Deauville. Le kérosène est le carburant des riches, il doit être inclus dans l’effort collectif.

Pour les routes, l’amélioration de l’existant doit primer. Comme le gouvernement a eu le courage de renoncer au projet dépassé d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, il faut aujourd’hui renoncer aux projets d’autoroutes qui déménagent nos territoires, éloignent des centres-villes… et sont contournées par les systèmes de navigation qui permettent aux poids-lourds d’éviter les péages, en toute légalité. C’est encore l’usager et le contribuable qui payent.

Le département de l’Eure, celui-là même du ministre de la « cohésion des territoires », Sébastien Lecornu, est emblématique de ces « territoires oubliés », où les gilets jaunes illustrent fortement l’absence d’alternative à la voiture.

Parlez-leur de péage et d’autoroutes ? Ils ont jeté les chaises lors des réunions de concertation sur la liaison A28-A13 en 2014 dans le département (1).

Tous les jours, ils prennent leur voiture, parce qu’il n’y a toujours pas de train entre les préfectures d’Évreux et Rouen – mais une deux voies. Combien de temps restera-t-elle gratuite, coincée entre deux futures portions d’autoroutes à péage ? Il n’y a pas d’alternative à cette route nationale payée par le contribuable. Ni ferrée, ni routière.

À Bourg-Achard, à Gisors, à Etrépagny, à Breteuil, à Saint-André de l’Eure : quel choix de mobilité à part la voiture ?

Rouvrons les gares au lieu de les fermer, comme la Région le fait et compte encore le faire. Harmonisons aussi les abonnements de train entre province et région parisienne.

Pour les 20% de nos concitoyens qui ne possèdent pas de voiture, c’est l’assignation à résidence, l’impossibilité d’aller travailler, étudier, et même se soigner. C’est la femme active qui devra prendre une journée de congé pour emmener sa mère âgée à ses rendez-vous médicaux. C’est le réveil à 5 heures du matin pour attraper un car.

Il y avait pourtant là des lignes de chemin de fer, les traverses sont encore en place, mais les trains n’y passent plus. C’est la voiture obligatoire, ou la relégation sociale et la perte d’autonomie.

Les autoroutes n’apporteront aucune amélioration à cette situation. Ce sont aujourd’hui des produits financiers lucratifs, comme l’a montré Marianne pour l’A28 à l’été 2018, mais elles n’ont aucune utilité, ni sociale ni environnementale. C’est une rente offerte par le contribuable aux concessionnaires, des raisins de la colère. Toute cette colère, le gouvernement, la Région et la métropole ne font que l’attiser en demandant de payer toujours plus, et en détruisant l’environnement.

Sans lisibilité, le consentement à la fiscalité est mis en péril (2).

Apportez-nous des alternatives ! « Si le train revient, je le reprends immédiatement ! » résumait une enquête de France Info il y a quelques jours (3).

Parlons-en mercredi 28 novembre à 12h30 au Bar des Fleurs à Rouen, avec le collectif « Non à l’Autoroute A133-A134 ».

 

Laetitia Sanchez, conseillère régionale de Normandie

 

(1)http://www.saintpierre-express.fr/liaison-a28-a13-cest-gouy-ymare-les-authieux-val-reuil-pitres-poses-manoir-lery-oissel-saint-etienne-du-rouvray-cest-partout/

(2) https://www.20minutes.fr/monde/2379055-20181123-taxe-carbone-pays-nordiques-transparence-pedagogie-ur-succes-fiscalite-ecologique

(3) https://www.francetvinfo.fr/economie/transports/gilets-jaunes/j-ai-craque-j-ai-repris-la-voiture-des-usagers-du-train-racontent-ce-qui-les-a-contraints-a-renoncer_3044811.html

 

Contact :

Groupe des Élu-e-s Normandie Écologie – EELV

73 rue Martainville – 76000 Rouen / 02 35 89 01 75 / elus-normandieecologie@eelv.fr